Un an après le séisme en Haïti, les communautés locales bâtissent la résilience
16 août 2022
Par l’équipe de l’Unité Résilience du PNUD en Haïti.
Le samedi 14 août 2021, un séisme de magnitude 7,2 a secoué la péninsule Sud d’Haïti vers 8h30, heure locale, provoquant la mort de plus de 2 000 personnes, des milliers de blessés et d’importants dégâts matériels liés à l’effondrement d’immeubles et au blocage de routes. Une catastrophe naturelle rappelant le choc vécu lors du tremblement de terre survenu en janvier 2010 et qui a été suivie par la dépression tropicale Grace.
Haïti a capitalisé sur les enseignements tirés de 2010. En 2021, le pays était mieux préparé. Le jour même du tremblement de terre, le gouvernement, à travers le Système national de gestion des risques et des désastres, a eu recours à son mécanisme principal d’action pour le relèvement en activant le Centre d’opérations d’urgence nationale et le Centre d’opérations d’urgence départemental. Pour sa part, le PNUD s’est positionné aux côtés du gouvernement haïtien au niveau national et départemental – à Sud, Nippes et Grand’Anse – à peine quelques minutes après la catastrophe, démarrant ainsi la planification de la réponse post-séisme.
Une ligne d’action sous-estimée bien qu’essentielle : la logistique
Malheureusement, depuis au moins deux ans, le Grand Sud connait des périodes d’isolation du reste du pays dû à l’insécurité et aux crises du carburant – une dynamique qui tend à rendre cette partie du pays encore plus vulnérable. Lors des livraisons de matériels ou de l’aide humanitaire, des attaques et des scènes de pillage sur les véhicules ont été commises dans la région et sur la Route Nationale 2. Cela affecte la chaîne d’approvisionnement des entreprises et des acteurs humanitaires dans le pays, mais surtout les populations locales en subissent les effets délétères. De plus, cela s’ajoute au fait que l’ensemble des routes inter-municipales se trouvent dans la précarité en raison du mauvais état des chaussées, du manque d’asphalte et de la sinuosité considérable du parcours. Voici deux défis de taille pour le relèvement post-séisme.
Le 14 août 2021, nous nous sommes donc posés la question : comment subvenir aux besoins des populations affectées par cette catastrophe naturelle et par la violence des groupes armés ? Ces personnes étaient doublement vulnérables et nous ne pouvions pas les laisser de côté.
Heureusement, une trêve a pu être négociée avec des groupes armés et les communautés sur la voie vers le Grand Sud, permettant la mise en place d’un couloir humanitaire temporaire. Cet accord a permis au PNUD d’assurer le transport des cadres sur le terrain en assurant les aspects logistiques (personnel, véhicules, essence, sécurité).
Appui aux opérations de sauvetage et évaluation des risques
Sur le terrain, les équipes locales du PNUD ont constaté l’entre-aide citoyenne. Grâce aux enseignement tirés d’autres catastrophes naturelles, les gens ont su réagir plus vite et de façon efficace. Par exemple, nous avons témoigné de la générosité d’un groupe de citoyens anonymes qui voyageaient en voilier vers une zone difficile d’accès pour apporter des fruits, des bananes et des arbres véritables à ses résidents.
Touchés par cet esprit de collaboration, nous avons appuyé nos partenaires sur le terrain dans la coordination des opérations de sauvetage, notamment la Direction générale de la Protection civile d’Haïti (DGPC). L’intervention programmatique post-séisme du PNUD a commencé dans les trois départements touchés, de concert avec les institutions municipales. Nous avons mené des actions de coordination, de relèvement économique et d’évaluation des risques.
Un des problèmes principaux dans les zones affectées était l’accumulation de débris dans les rues. Dans le but de donner une solution à cette réalité, nous avons appuyé les mairies dans l’organisation d’activités de ramassage de débris. Dans la commune de Maniche, nous avons accompagnés des équipes de volontaires qui ont même utilisé les débris empilés pour cimenter la route municipale.
Bâtir la résilience post-séisme par l’action locale
Conscients du besoin d’informer les communautés pour les inclure dans la réponse post-séisme, nous avons organisé des sessions d'information et de prévention des risques au niveau des communautés et des écoles locales. Or, cette ligne d’action a été fortement entravée par les pénuries de carburants répandues sur le territoire haïtien.
Par ailleurs, l’équipe du PNUD a détecté le besoin de contribuer au relèvement économique local en créant des emplois pour les personnes atteintes plus sévèrement par le séisme. Ainsi, l’initiative « Cash for work » a embauché plus de 1 000 personnes de manière temporaire (au moins 24 jours) pour le déblaiement et l’assainissement des villes. Le soutien financier donné à 60 entreprises (20 par département touché) investies dans l’agro-alimentation, l’artisanat, la couture ou la restauration vise également cet épanouissement des micro-entreprises locales dans les zones affectées.
Cependant, notre engagement envers les populations les plus vulnérables nous demandait de mettre l’accent sur ces localités sur le long terme. Nous avons abordé la question de l’autonomisation des femmes, qui perdent souvent leurs emplois au lendemain des séismes et sur qui repose la plupart du travail domestique. En mai 2022, notre ambition est devenue réalité en l’initiative « Yes! She Paints », qui soutient 60 femmes en capacité de réduire le déficit de bras féminins dans les métiers manuels en Haïti. Puis, les formations en employabilité, en peinture de bâtiments ou en respect écologique se sont succédées, des enseignements qui feront l’objet d’un suivi pour assurer la continuité de ces activités d’entreprenariat.
C’est cette implication auprès des populations qui a réveillé la reconnaissance des institutions locales. Malgré nos ressources limitées, elles ont apprécié nos efforts après plusieurs mois. Les maires et les mairesses ont fait remarquer : « Vous n’avez pas attendu qu’on se rapproche de vous pour nous contacter, vous étiez là depuis le début », ce qui nous conforte dans nos efforts pour soutenir la population.
Les réponses aux catastrophes naturelles sont toujours complexes et demandent des efforts soutenus à travers les années, d’autant plus dans un pays en voie de développement comme Haïti dont la structure économique est faible et les maux sociaux comme l’insécurité sont palpables. Or, la résilience ne veut pas forcément dire être inébranlable, le concept signifie plutôt raccourcir le temps qu’une nation prend pour se relever après un tel évènement. Dans ce sens, l’impact des opérations de coordination et le renforcement de la mobilisation citoyenne constatés cette année représentent des progrès par rapport aux crises précédentes. Cela nous semble un premier pas en avant qui apporte du sens à notre travail de dynamisation du développement en Haïti.