Le secteur pêche n’est pas épargné par les effets du changement climatique. On note un réchauffement océanique où la température des eaux de surface (de 0 à 700 mètres de profondeur) s’est accrue en moyenne de 0,7 °C par siècle à l’échelle mondiale entre 1900 et 2016. Une hausse globale des océans de 40 cm est attendue d'ici 2100 dans un scénario optimiste de réchauffement climatique, associées à une acidification de l’océan, réduisent les réserves de poissons, détruisent les habitats et affectent les migrations des différentes espèces comestibles. Le secteur de la pêche joue un rôle primordial dans l’économie malgache. Il fait vivre plus d’1,5 million d’habitants vivant le long du littoral de Madagascar en plus, avec une production annuelle de 750 millions de dollars, soit 7% du PIB national et une contribution de 6,6% aux exportations de la Grande Île. 

Conscient de ces situations complexes, le Ministère de l’Environnement et du Développement Durable (MEDD) soutenu par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et le Fonds pour l'environnement mondial (FEM) a mis en place deux alternatives d’atténuation et d’adaptation pour renforcer la résilience des communautés de pêcheurs, dans trois Régions Androy, Anosy et Atsimo Andrefana.

Un leadership féminin dans le reboisement de mangrove 

En novembre 2020, la région Atsimo Andrefana a expérimenté une pépinière de 5 000 pieds d’un nouvel espèce de mangrove acclimaté, pour reboiser le littoral d’Andrevo bas.

Cette initiative de la Direction Régionale de l’Environnement et du Développement Durable de la région Atsimo Andrefana, appuyé par le PNUD, a mobilisé la communauté de la commune de Manombo. 

Sous le leadership communautaire de Bien Aimée, la Présidente du REseau NAtional des FEmmes de la Pêche (RENAFEP) de la commune de Manombo, plus d’une centaine de personnes, dont 70% de femmes ont rejoint les autorités sur le site de reboisement pour apporter leurs contributions dans la protection de l’environnement et du développement de la pêche. 

« On nous a expliqué que les mangroves renouvellent notre air et qu’ils sont propices à la reproduction des fruits de mer : les crabes, crevettes et poissons. Les mangroves servent aussi aux pêcheurs de repère et d’abris en cas d’intempérie. Nous n’avons pas de forêt mais nous avons des mangroves, c’est pour cela que notre communauté est motivée dès qu’on parle de son reboisement », raconte Bien Aimée.

Cette femme de pêcheurs d’une quarantaine d’année, est respectée. Toujours le sourire aux lèvres, mais ferme quand il le faut, elle est consciente des enjeux de ce reboisement et de ce qu’il apportera dans le futur. Après les discours des officiels et les consignes de reboisement des techniciens, tout le monde se rue sur les jeunes plantules et met le cœur à l’ouvrage. Les hommes trouent la boue, les femmes et les enfants plantent méthodiquement les jeunes plants. De loin, on aperçoit Bien-Aimée, la femme forte faisait ses va-et-vient pour couvrir l’ensemble du site de reboisement pour contrôler la mise en terre des 5000 pieds de mangrove prévus. Des gens crient de partout « Madame sachet ».  Madame Sachet n’est autre que Bien Aimée elle-même. Elle collecte les pots plastiques couvrant les jeunes plants. « Je ne veux pas que ces plastiques s’éparpillent dans le champ reboisé, sinon, ce seront une nouvelle pression à l’environnement » déclare Bien Aimée fermement.

A part les activités de reboisement, Bien-Aimée est aussi un des points focaux responsable de sa commune pour l’entretien et la mise à jour des informations sur le système d’alerte précoce des pêcheurs appelé « Mitao Forecast ».

Le Mitao forecast : un système communautaire d’alerte précoce innovative.

Grâce au partenariat du Ministère de l’Environnement et du Développement Durable, du Ministère du Tourisme, des Transports et de la Météorologie et du Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche avec l’appui du PNUD et du Fonds pour l’Environnement Mondial, ce système d’alerte précoce facilite l’accès aux informations météorologiques aux populations rurales et réduit les risques de catastrophes chez les communautés des pêcheurs. Il s’agit d’un panneau avec des signalisations faciles à lire et à comprendre dont la direction et la vitesse du vent, la hauteur possible des vagues.

Un point focal, comme Bien aimée, est désigné au niveau du village pour recevoir les prévisions météorologiques par SMS. Puis, il lui appartient de convertir les données sur les conditions météorologiques locales en code couleur et en images prédéfinies.

De nombreux accidents en mer sont depuis évités dans les zones où est établi ce système d’alerte précoce, surtout en saison cyclonique car les pêcheurs disposent des informations nécessaires sur les conditions météorologiques locales au moins tous les quatre jours.

Mais ce panneau est aussi très important pour les femmes de pêcheurs. 

« En tant que femme de pêcheur, ce panneau est très important pour nous car il nous informe de la prévision météorologique tous les 4 jours. Auparavant, nous liquidons le jour-même tous les poissons à des prix dérisoires parfois. Mais maintenant, quand il vente beaucoup, nos maris restent à terre c’est donc à ce moment-là que nous vendons nos poissons dans les marchés des communes environnantes. Ainsi, il nous permet de gérer nos stocks de poissons pour éviter que l’offre soit supérieure à la demande ce qui fait diminuer le prix » explique Bien aimée. 

Plus de 14 700 personnes des communautés de pêcheurs bénéficient de la mise en place de 21 panneaux de système d’alerte précoce Mitao forecast pour la navigation en mer.

Tenant compte des rôles fondamentaux de ces femmes d’action dans la communauté des pêcheurs, un renforcement de capacité sur la législation de la pêche leur a été donné à la constitution du réseau en 2018. 12 villages de pêcheurs de la commune en sont concernés. Des matériels de préparation et de stockage des poissons pêchés leurs ont été aussi octroyés comme les cuvettes, les balances, les glacières, les seaux et les couteaux. 

Jusqu’ici, l’opérationnalisation de ce système est encadrée par l’ONG Aquatic Services