La gestion des déchets plastiques est une question importante qui interpelle tous les Bamakois dans la mesure où notre cadre de vie est envahi par ces derniers. En visitant la capitale, on est tout de suite impressionné par les dépôts anarchiques et l’incivisme qui n’ont d’autre conséquence que de salir notre cadre de vie et causer des inondations par endroit. Face à cette situation, les partenaires au développement, les organisations de la société et le gouvernement planifient et mettent en œuvre des actions de développement. Malgré les efforts consentis, le gap entre les résultats atteints et les objectifs fixés sont importants. Ainsi, le PNUD a initié les laboratoires d’accélération pour repenser notre approche, catalyser les solutions innovantes locales afin de répondre aux défis de notre époque. Dès l’entame de notre premier cycle d’apprentissage, nous voulions apporter notre contribution à la recherche de piste de solutions pour une meilleure gestion des déchets plastiques ; c’est alors que nous avons commencé à chercher à mieux comprendre le défi à travers une approche qui combinait les entretiens et l’observation directe.
Les entretiens toujours sympathiques et conviviaux avec les acteurs étatiques, les organisations de la société civile, les collectivités ont permis d’apprendre qu’il n’existe pas d’infrastructures adéquates dans les communes pour accueillir les déchets laissant ainsi place aux dépôts anarchiques. L’analyse comportementale montrait également que le citoyen n’a pas cette habitude de séparer les déchets plastiques des autres types de déchets et pire n’hésite pas à les jeter dans la rue et souvent à côté d’une poubelle. Ces informations que nous recevions, donnaient envies de découvrir davantage. Ainsi, nous avons visité des dépôts d’ordure notamment celui appelé « le mont kilimandjaro » à Lafiabougou qui de par sa taille est semblable à cette montagne de la Tanzanie longue de 5 895 m. Là-bas, ce sont des individus (hommes, femmes et enfants) qui au milieu des moustiques font le tri des déchets plastiques destinés à quelques entreprises de recyclage. Les informations recueillies ça et là ont permis de savoir que la filière ne présente pas que des enjeux mais aussi des opportunités économiques que nous voulions découvrir.
Dénicher les innovateurs locaux intervenant dans la gestion des déchets plastiques était une nouvelle expérience pour nous ‘laborantins’ et il fallait la réussir. Nous étions tous enthousiastes de l’entamer sous la responsabilité de la cartographe. Ainsi, nous avons adopté plusieurs stratégies qui consistaient à faire l’immersion sociale, à chercher sur internet et le bouche à oreille. Motivé par l’apprentissage, nous nous sommes promenés dans la ville de Bamako et périphérie et avons constitué une base des données des solutions innovantes locales dans la gestion des déchets plastiques. Le but étant de les tester et d’offrir aux investisseurs un éventail de solutions locales qui pourraient être intégrées dans un travail de développement à grande échelle. Pour satisfaire la curiosité du lecteur, nous présentons non pas toutes les solutions innovantes locales mais plutôt une que nous avons testé et dont les résultats obtenus surprendront plus d’un.
· L’initiative « Bamako sans déchets plastiques » : est née du constat que Bamako croule sous le poids des ordures notamment les déchets plastiques alors que ceux-ci peuvent être valorisés afin de promouvoir une économie circulaire et susciter un changement de comportement à travers le tri à la source. Ainsi, cette organisation locale a initié des kiosques d’achat des déchets plastiques et a noué un partenariat avec un recycleur des déchets plastiques. Cette initiative nouvelle dans le contexte malien a vu le jour quelques mois avant la création des laboratoires d’accélération.
A la suite de la cartographie des solutions qui consiste à trouver des innovations locales pour répondre aux défis, le temps était venu pour nous de rentrer au « laboratoire social » pour tester la fonctionnalité des solutions innovantes cartographiées. Ce test nous a conduit dans un quartier populaire du district de Bamako où les habitants ont un accès limité au service d’assainissement. Notre étonnement fut grand au vu de la mobilisation des autorités et population autour des kiosques d’achat des déchets plastiques. Les femmes et enfants procédaient au tri à la maison et faisaient la queue leu leu pour vendre leurs déchets plastiques dont le kilogramme coûtait 100 FCFA. Les rues des secteurs abritant les kiosques étaient devenues propres car les enfants se promenaient d’une rue à l’autre pour ramasser les déchets plastiques qui désormais avaient une valeur à leurs yeux. Ce sont au total 3T 933 kg de déchets qui ont été collectés. Les trois entreprises de recyclage partenaire du test se réjouissaient de la disponibilité de la matière première même si leur capacité de transformation est limitée. Nous avons appris au cours de cette expérience que si les déchets plastiques ont une valeur marchande alors ils disparaîtront dans la nature pour créer des emplois et améliorer les revenus des populations. Enfin nous avons appris que le secteur privé, les partenaires stratégiques et le gouvernement doivent explorer cette piste qui lorsqu’elle est mise à l’échelle permettra d’atteindre les Objectifs de Développement Durable (ODD) ci-après.
Auteur : Issa Bamba
Responsable Expérimentation Accelerator Lab / PNUD Mali