Par Anthony Ngororano, Representant résident du PNUD en Mauritanie et Carolin Frankenhauser, Analyste numérique au PNUD, Cheffe du bureau numérique.
Il est largement reconnu que la technologie numérique a un énorme potentiel dans le domaine du développement. Mais les fractures numériques persistantes menacent également de laisser encore plus à la traîne les plus vulnérables. La fracture numérique entre les sexes est, par exemple, particulièrement élevée dans les pays les moins avancés (PMA), où seulement 19 % des femmes utilisent l'internet (contre 31 % des hommes).
Le PNUD est parfaitement conscient de l'étroitesse de la ligne que la communauté du développement doit suivre pour promouvoir la transformation numérique. En Mauritanie, le PNUD travaille avec le ministère de la Transition numérique, de l'Innovation et de la Modernisation du secteur public (MTNIMA), nouvellement créé, afin de s'assurer que la transformation numérique contribue de façon inclusive et bénéfique aux résultats du développement en faveur des plus vulnérables.
La Mauritanie est un pays vaste à la densité de population d'à peine un peu plus de quatre personnes au kilomètre carré. Quarante-quatre pour cent de la population vit en zone rurale, souvent dans des villages reculés où les infrastructures ou l'accès à l'information et aux services publics sont très limités. Selon les données les plus récentes, recueillies en 2017, seulement 21 % de la population utilisait internet. Qui plus est, le coût du haut débit fixe reste prohibitif pour la majorité de la population. Si dans le contexte mauritanien, les opportunités inhérentes à la transformation numérique sont évidentes, la transformation numérique risque également d'exacerber les inégalités existantes, par exemple entre populations rurales et urbaines. Alors que l'utilisation de la technologie numérique et des smartphones peut être répandue dans les villes, les populations rurales demeurent souvent déconnectées, et ne peuvent par exemple pas bénéficier des services gouvernementaux qui sont de plus en plus rendus disponibles en ligne.
Tirer parti du potentiel du numérique et de l'innovation pour le développement est une priorité essentielle de la Stratégie nationale de développement de la Mauritanie. En raison de la pandémie de COVID-19, le gouvernement a accéléré la création d'un ensemble d'institutions devant assurer le leadership de la transformation numérique de la Mauritanie et garantir une approche pangouvernementale et sociétale. Guidé par le Conseil numérique de haut niveau (HCN), un conseil stratégique présidé par le Premier ministre et comprenant des représentants du secteur privé, le ministère nouvellement créé (MTNIMA) conduit la transformation numérique à travers une série de piliers stratégiques, notamment la réglementation, l'infrastructure, l'administration en ligne, les affaires numériques, la transformation sectorielle et le capital humain. Le MTNIMA s'attachera également à améliorer la transparence et l'accessibilité des services publics, ainsi qu'à rapprocher le gouvernement du peuple mauritanien.« Le MTNIMA », a déclaré le Dr Mohamed Lemine Ould Salihi, stratège en chef du MTNIMA pour la transformation numérique, « servira à la fois d'instrument central pour relier le présent de notre pays à son avenir, et de pont entre l'administration publique et nos citoyens ».
Le PNUD a été un partenaire clé du MTNIMA depuis sa création, conseillant sur l'inclusion numérique et la gouvernance de la transformation numérique du secteur public et tirant parti de son rôle d'intégrateur dans le système des Nations Unies pour identifier les partenaires stratégiques de mise en œuvre. Le MTNIMA partageant actuellement l'agenda de la transformation numérique de la Mauritanie, il existe une opportunité exceptionnelle d'intégrer une approche inclusive dans la stratégie, la conception institutionnelle et les approches du MTNIMA, et ce dès le départ. Jusqu'à présent, le PNUD et le MTNIMA ont travaillé ensemble à l'établissement d'un ensemble de fondations numériques :
- Dans un premier temps, le PNUD a réalisé une analyse comparative afin d'identifier les bonnes pratiques en matière de configuration institutionnelle nécessaire pour permettre au MTNIMA de mener à bien le programme national de transformation numérique. Sur la base des résultats de cette analyse, le PNUD a conçu la structure, les rôles, les responsabilités et le budget d'une nouvelle agence numérique de l'État (ANETA) qui servira d'instrument de mise en œuvre du MTNIMA. L'un des principaux domaines de travail de l'ANETA est l'accélération de l'inclusion numérique.
- Ensuite, le PNUD et le MTNIMA ont mené conjointement une évaluation de haut niveau de la préparation numérique qui comprenait une enquête en ligne pour comprendre les perspectives des Mauritaniens sur les risques et les opportunités de la transformation numérique. Les résultats de cette enquête ont fourni un aperçu de qualité du paysage numérique de la Mauritanie et ont révélé une forte appétence des participants à l'enquête pour les technologies numériques. Des recherches qualitatives et quantitatives plus approfondies seront nécessaires pour comprendre comment les différents groupes de population utilisent et bénéficient déjà des technologies numériques, quelles sont les fractures numériques et qui est exclu du numérique. Le PNUD travaillera avec le MTNIMA pour s'assurer que le nouveau cadre de résultats de l'Agenda numérique inclut une attention particulière aux plus vulnérables.
- En collaboration avec l'Estonian E-Governance Academy, le PNUD et le MTNIMA ont lancé un module de formation d'un mois sur les principes de la gouvernance électronique à l'intention des experts numériques du secteur public. La formation a couvert des sujets tels que la cybersécurité, la protection des données et l'identité numérique, et a suscité de nombreuses discussions au sein du MTNIMA et au-delà. Parmi les questions abordées, citons : Quelles formes d'identité numérique sont les plus adaptées au contexte mauritanien ? Comment changer les méthodes de travail des agents du secteur public et accroître l'adoption des technologies numériques ? « Ayant lancé plusieurs activités pour notre département », a déclaré Matchiane Bacar, chargée de projet au MTNIMA, « je considére que cette série de formations s'est révélée très utile car elle couvrait différents sujets importants dans le domaine de la numérisation. À l'avenir, nous verrons comment appliquer les connaissances acquises à notre contexte spécifique ».
En 2022, le PNUD continuera à soutenir le MTNIMA alors qu'il affine son nouvel Agenda numérique et met en place de nouveaux processus et rôles pour sa mise en œuvre. Le PNUD continuera de plaider pour l'importance d'une transformation numérique inclusive et d'identifier les partenaires appropriés, notamment par le biais du Réseau multipartite pour le renforcement des capacités numériques, de l'Alliance pour les biens publics numériques, et d'autres.