L’absence de femmes dans les cellules de crise COVID-19 perpétuera les disparités de genre, affirment le PNUD et ONU Femmes
22 mars 2021
New York, le 22 mars 2021 – Les cellules de crise mises en place par les gouvernements pour lutter contre la COVID-19 comptent trois fois plus d’hommes que de femmes à travers le monde. En raison de cette sous-représentation, les femmes auront plus de difficultés à se relever de la pandémie, selon de récentes données publiées par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), ONU Femmes et le Gender Inequality Research Lab (GIRL) de l’Université de Pittsburgh.
Un an après le début de la pandémie, les 225 cellules de crise COVID-19 étudiées dans 137 pays ne comptent toujours que 24 % de femmes en moyenne, d’après les informations obtenues à l’aide de l’outil COVID-19 Global Gender Response Tracker, qui permet d’analyser les politiques adoptées par les gouvernements dans le contexte de la pandémie. Il est par ailleurs frappant de constater que 26 de ces cellules de crise ne comptent aucune femme parmi leurs membres.
Ces nouvelles données sont présentées alors que le monde continue de livrer bataille contre la pandémie et ses répercussions considérables sur les femmes. De leur rôle en tant que soignantes en première ligne jusqu’aux pertes d’emplois causées par la contraction de l’économie informelle, en passant par la hausse alarmante du nombre de cas de violence domestique et la charge de travail non rémunéré que représentent les soins à la famille, 47 millions de femmes supplémentaires risquent de basculer dans l’extrême pauvreté.
« Les femmes, qui représentent 70 % du personnel de santé à l’échelle mondiale, sont en première ligne de la lutte contre la COVID-19. Et pourtant, elles sont systématiquement exclues des processus décisionnels concernant les mesures à prendre pour faire face aux retombées de la pandémie. Ces nouvelles données édifiantes montrent, par exemple, que seuls huit pays dans le monde disposent de cellules de crise COVID-19 respectant la parité des sexes », a déclaré Achim Steiner, l’Administrateur du PNUD. « Il est indispensable de veiller à la participation pleine et inclusive des femmes au travail des institutions publiques afin que leurs besoins soient correctement pris en compte dans les décisions capitales qui sont prises actuellement – il s’agit là de choix qui détermineront leur avenir pour les générations futures. »
Sans femmes à des postes de décision, les mesures prises par les gouvernements pour lutter contre la COVID-19 risqueront davantage de ne pas prendre en considération les besoins des femmes, ce qui pourrait exacerber encore l’inégalité des chances dans le relèvement de cette pandémie, qui menace déjà de balayer des décennies de progrès en matière d’égalité des sexes.
Le PNUD et ONU Femmes exhortent les gouvernements à veiller non seulement à ce que les femmes participent, sur un pied d’égalité avec les hommes, aux efforts déployés pour réagir à la pandémie et s’en relever, mais aussi à ce qu’elles disposent d’un pouvoir de décision égal à celui des hommes et des mêmes possibilités d’accéder à des postes de direction. Pour lutter efficacement contre la COVID-19, les gouvernements doivent également intégrer la dimension de genre dans leurs politiques et leurs programmes, et pourtant, 32 pays ne disposent toujours pas de mesures sensibles aux questions de genre dans leurs plans d’action contre la pandémie.
« Il est inconcevable de pouvoir faire face à la crise la plus discriminatoire que nous ayons connue jusqu’à présent sans la pleine participation des femmes », a déclaré Phumzile Mlambo-Ngcuka, la Directrice exécutive d’ONU Femmes. « Pour l’instant, les hommes se sont donné pour tâche impossible de prendre les bonnes décisions pour les femmes sans consulter ces dernières. Il faut remédier à ce problème sans délai, afin que nous puissions œuvrer ensemble à un avenir équitable et plus vert en tenant compte des disparités entre les sexes. »
Le processus de relance économique présente des lacunes et il fait jusqu’à présent largement fi des besoins propres aux femmes. Les données de l’outil révèlent qu’en mars 2021, seulement 13 % des 2 280 mesures budgétaires, de protection sociale et d’emploi prises dans le contexte de la pandémie de COVID-19 visaient à assurer la sécurité économique des femmes. Et ces mesures – depuis les transferts en espèces jusqu’à l’aide alimentaire qui ciblent les femmes ou leur accordent la priorité – sont souvent de faible envergure et de nature temporaire : un an après le début de la pandémie, la plupart des systèmes de transferts en espèces n’ont duré que 3,3 mois seulement en moyenne. Les trains de mesures budgétaires doivent inclure des mesures à long terme visant spécifiquement à aider les femmes à mieux se relever de la pandémie.
L’outil de suivi révèle également que seulement 11 % des mesures de protection sociale et d’emploi s’attèlent au problème des soins à la famille et du travail domestique non rémunérés, des tâches que les femmes assumaient déjà trois fois plus que les hommes avant la pandémie. Les bonnes pratiques, observées pour la plupart en Europe et dans les Amériques, comprennent la fourniture de services de garde d’enfant (34 pays), le congé payé pour raison familiale ou pour maladie (44 pays), ou encore des modalités de travail plus souples (11 pays).
« Nous avons besoin de plus de données et de données de meilleure qualité, et des collaborations telles que celle mise en place entre l’Université de Pittsburgh et l’Organisation des Nations Unies peuvent nous aider à atteindre cet objectif », a expliqué Ann E. Cudd, Doyenne et Vice-Chancelière séniore de l’Université de Pittsburgh. « Ce partenariat de recherche a permis de générer d’importants volumes de nouvelles données qui non seulement mettent le problème en évidence, mais nous fournissent également les éléments factuels nécessaires pour combattre ces disparités. »
D’après les données recueillies à l’aide de l’outil, les efforts sexospécifiques déployés par les gouvernements pour lutter contre la COVID-19 demeurent pour la plupart axés sur la recrudescence de la violence à l’égard des femmes et des filles pendant la pandémie. Quelque 64 % des mesures sexospécifiques recensées dans l’outil visent à prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles ou à y faire face, notamment au travers de la mise en place de services d’assistance téléphonique, de refuges et de mécanismes judiciaires.
Bien qu’il s’agisse d’une première étape positive, seul un tiers des pays disposant de données à ce sujet ont pleinement intégré les services liés à la violence à l’égard des femmes et des filles dans leurs plans nationaux et locaux de réaction à la pandémie.
Note à l’attention des journalistes :
Le COVID-19 Global Gender Response Tracker créé par le PNUD et ONU Femmes, hébergé sur la COVID-19 Data Futures Platform (une plateforme de données relatives à la COVID-19), fournit des informations sur les disparités de genre dans les réponses à la COVID-19, depuis la violence fondée sur le genre jusqu’à la relance économique, en passant par les mesures de protection sociale ciblant les femmes. Il a été actualisé depuis son lancement en septembre 2020, afin d’y inclure plus de 3 100 mesures prises dans 219 pays et territoires.
Le Gender Inequality Research Lab (GIRL) de l’Université de Pittsburgh a élaboré la méthodologie de recherche et contribué à la collecte de nouvelles données sur la représentation des femmes aux postes de direction et au sein des cellules nationales de lutte contre la COVID-19, dans le cadre de son partenariat avec le PNUD sur la thématique de l’égalité des sexes au sein de l’administration publique. Les Volontaires des Nations Unies en ligne ont également contribué à ce projet.
Une analyse approfondie des données de l’outil de suivi est proposée ici, dans des fiches explicatives.