Des mini réseaux pour connecter et développer le Sahel rural

En Afrique, selon l’agence internationale de l’énergie, près de 600 millions de personnes soit 43% de la population n’avaient toujours pas accès à l’électricité en 2021. En fin d’année 2022, l’un des programmes les plus ambitieux visant à l’implémentation et à l’utilisation des énergies renouvelables au Sahel a été lancé. Le programme mini-réseaux en Afrique (Africa Minigrid Program - AMP), financé par divers bailleurs internationaux et piloté par le PNUD en lien avec les Etats, doit aider les pays à adopter de nouveaux modèles d’alimentation électrique. Des mini-réseaux électriques, généralement indépendants du réseau électrique national, moins coûteux et plus rapides d’installation en plus d’êtres vertueux pour la planète. Ils permettront de fournir en électricité les communautés reculées des territoires sahéliens. Une source primordiale d’énergie non seulement pour les ménages mais aussi les services publics, qui doit offrir de nouvelles opportunités économiques et de développement.

9 août 2024
a group of people riding on the back of a bicycle

Burkina Faso

Photo: UNDP WACA

Au Burkina Faso, la lumière au bout des territoires 

Entre 2016 et 2019 selon l’African development Fund, le taux d’électrification rurale dans le pays est passé de 3,2 à près de 10%. Un progrès certes mais un progrès contraint par le coût élevé de la méthode d’extension du réseau. Une alternative moins coûteuse et écologique est donc privilégiée: le solaire. C’est une source d’énergie inépuisable qui changera à termes, la vie de nombreuses populations rurales du Burkina Faso. Dans les régions des Cascades, de la Boucle du Mouhoun, du Centre, du Centre-nord, du Centre-est, du Nord et du Plateau Central, sept communes bénéficieront bientôt du programme mini réseaux en Afrique. Il s’agit de dispositifs électriques types, qui fonctionnent grâce au solaire et généralement indépendamment du réseau national. Une alternative face au manque d’accès à l’électricité des communautés. 

« C’est un projet innovant qui doit permettre aux localités qui n’ont pas accès au réseau conventionnel, d’avoir accès à des énergies renouvelables. L’énergie est au carrefour du développement. Agriculture, élevage, agro alimentaire en dépendent. L’énergie va permettre de développer ces localités en les raccordant pour la consommation quotidienne des ménages et pour les activités productives. »
Roger Baoue, coordinateur du projet pour le bureau du PNUD au Burkina Faso

Et il ajoute “le projet doit permettre de toucher les femmes et les jeunes en particulier. La question du genre et les thématiques d’environnement sont également prises en compte ».  Le montant de l’enveloppe alloué par le Fonds pour l'Environnement Mondial (FEM), le PNUD et l’Etat du Burkina Faso étant de 1 086 476 580 F CFA. 

Un programme vert à l’approche innovante 

Au Burkina Faso, le projet a été bâti sur quatre piliers. D’abord, la politique et la réglementation. C’est à dire contribuer à lever les obstacles politiques, réglementaires et institutionnelles identifiés dans le scénario de base et qui empêchent les investissements du secteur privé pour l’adoption des mini-réseaux d’énergie renouvelable dans le pays.Ensuite, le financement à grande échelle qui doit permettre de faciliter l’accès à des capitaux commerciaux à faible coût (capital et dette), idéalement en monnaie locale, afin de réduire le coût des mini-réseaux et d’assurer leur  viabilité commerciale à long terme. Puis, l’innovation des projets et des modèles d’affaires, avec l’engagement du secteur privé. Enfin, l’utilisation d’outils et solutions numériques, gestion des connaissances, suivi et évaluation.

« Généralement les communautés ayant des moyens limités utilisent un mode de gestion coopératif pour la gestion de l’électricité. Mon souhait est qu’à l’horizon 2025 on puisse avoir un taux d'électrification rural très élevé dans les localités hors réseau et je pense que notre projet devrait y contribuer fortement. Le secteur privé est le moteur du développement. Une fois que celui-ci trouve un modèle qui lui convient, il le multiplie et le déploie. A nous (PNUD) de mettre ce modèle à disposition » explique Roger Baoue. 

De manière générale, le programme de mini réseaux pour l’Afrique doit bénéficier à 21 pays du continent. Selon la modélisation du PNUD, les mini-réseaux sont l'approche la moins coûteuse pour fournir l'électricité à 265 millions de personnes dans ces pays d'ici 2030. 65 milliards de dollars en nouveaux investissements seraient nécessaires pour concrétiser cette opportunité. Cela équivaudrait à la construction de 110 000 mini-réseaux, qui fourniraient un accès à l’électricité à plus de 200 000 écoles et centres de santé, ainsi qu’à 900 000 petites et moyennes entreprises.

Pour les Etats sahéliens, le chantier crucial des énergies renouvelables 

Face aux impératifs de développement et de prospérité des peuples, dans une région qui subit de plein fouet les effets néfastes du changement climatique, le recours et l’accès généralisé aux énergies renouvelables apparaissent plus que jamais comme le modèle adéquat. Conscients de ces enjeux, les Etats du Sahel ont entamé la mise en place de ces grands chantiers. Par exemple, le Burkina Faso s’est doté d’une importante Agence Nationale des Energies Renouvelables et de l’Efficacité Energétique depuis 2017, ayant pour missions de « promouvoir, susciter, animer, coordonner, faciliter et réaliser toute opération ayant pour objet le développement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique ».  L’Etat Burkinabé prévoyait en 2015 notamment, de doubler en vingt ans sa capacité installée en mégawatts pour les énergies renouvelables, de 15% en 2010 à 36% en 2030. 

L’agence internationale de l’énergie, qui reconnait au Sahel son puissant potentiel en énergies vertes (éolien, biomasse, solaire, hydraulique…) et ses potentialités économiques, estime dans ses projections suivant un scénario d’évolution positive qu’à l’horizon 2030, le Sahel doit raccorder 8.5 millions de personnes par an au cours de la décennie. D’après les analyses géo-spatiales déterminant les technologies les plus efficaces pour apporter l’électricité aux populations du Sahel, les extensions du réseau raccorderont près de la moitié des ménages sans accès à l’électricité, en particulier dans les régions les plus densément peuplées du Sénégal et de la Mauritanie. Les mini-réseaux connecteront un tiers de la population alors que les systèmes solaires individuels seront la solution la plus économique et rapide pour un-cinquième des personnes qui gagnent accès à l’électricité. L'accès universel à la cuisson propre requiert quant à lui de déployer plus de 2 millions d’équipements modernes par an.