Au Sénégal, François Diouf, agriculteur engagé et solidaire

Le jour se lève sur le petit village de Mont-Rolland au Sénégal, à 2 heures de route de la capitale Dakar. Comme chaque matin, François Diouf, président d’une ferme communautaire écologique et sociale créée en 2011, est réveillé depuis l’aube. À l’heure où la majorité des habitants de ce grand village dorment encore, il attelle son âne et monte sur sa charrette pour partir au champ, à 30 minutes de là.

12 août 2024
a man wearing a green shirt

Senegal

Photo: UNDP WACA

Avec une vingtaine de jeunes paysans du village, ils ont mis en commun 5 hectares de terres où ils travaillent tous ensemble. Ce jour-là, ils terminent de faire le semis des haricots verts. Après la traditionnelle réunion matinale, tous s’exécutent en cadence, avant que le soleil ne soit trop chaud pour travailler.

Solidarité villageoise

Dans cette ferme, tout est basé sur la solidarité villageoise, loin de l’individualisme des grandes villes. « Ici, nous produisons des haricots pour l’export, et d’autres  produits tels que la tomate, le piment et le gombo, destinés au commerce local. On partage équitablement toutes les recettes de nos ventes », se félicite François Diouf.

Lors de la dernière campagne, 200 tonnes de légumes ont été produits. « Sans cette solidarité, nous n’arriverions pas à de tels rendements. Chacun est là pour l’autre. Si un de nous est malade, un autre le remplace au pied levé, même s’il n’avait pas prévu de travailler ce jour-là », poursuit-il.

« Ici notre devise est ‘ensemble, on est plus forts’ ! ».
François Diouf, président d’une ferme communautaire écologique et sociale à Mont-Rolland, Senegal

D’où le nom de leur groupement : “GIE Khabaranta”, qui signifie “s’entre-aider” en sérère Ndut, la langue parlée à Mont-Rolland. 

Créer de l’emploi en zone rurale

Tous l’assurent, dans cette ferme communautaire, chaque agriculteur gagne assez pour subvenir à ses besoins et vivre dans des conditions décentes. « Bien plus que ceux qui ont décidé de partir », lâche l’un d’eux. À  Mont-Rolland comme dans de nombreux villages de l’intérieur du Sénégal, l’exode rural est un fléau difficile à endiguer. Certains partent en ville, d’autres tentent leur chance sur les périlleuses routes de l’immigration vers l’Europe au péril de leur vie. « C’est pour éviter cela qu’on a créé cette ferme collective dans notre localité », explique François Diouf.

Il se veut l’exemple de cette jeunesse qui peut croire en un avenir dans son village natal. « Je n’ai pas voulu céder au mythe européen, j’ai décidé de rester chez moi. Il y a un présent et un avenir pour notre jeunesse à Mont-Rolland ». Si certains jeunes ont pu être tentés, François l’assure, « aujourd’hui, chacun se donne à fond ».

Engagement social et écologique

Fier de contribuer à la création et au maintien d’emplois en zone rurale, François considère également que les jeunes sont bien plus utiles à leur communauté en y restant. De fait, avec la production de leurs légumes, François et ses collègues contribuent à nourrir la population de Mont-Rolland. « Mon vœu c’est que les jeunes reprennent goût au travail de la terre. L’agriculture est une activité noble et une opportunité pour notre jeunesse. Ici, nous perpétuons ce que faisaient nos parents avec plus de moyens ». Et d’ajouter : « il y a de plus en plus de bouches à nourrir au Sénégal ainsi qu’au Sahel. Nous avons besoin d’elles pour consommer nos propres produits et arrêter de les importer ».

Produire plus et mieux donc. Pour tous les agriculteurs, l'engagement écologique va de pair avec l’engagement social. Les 5 hectares de plantations sont irrigués par un système alimenté par l’énergie solaire. François et les autres prennent le soin de cultiver de la façon la plus naturelle possible. « Ici, notre agriculture est plus propre, plus verte, plus vertueuse », insiste-t-il.

Un modèle à suivre ?

Après une saison des pluies qui a détruit une partie des installations et des plantations, François Diouf et les siens ont bénéficié d’un appui du Programme des Nations Unis pour le développement (PNUD). En 2020, il a reçu 8 millions de FCFA, soit 13 200 dollars pour relancer sa production. « Cela nous a permis de reprendre l’activité. Grâce à cette aide, nous avons acheté des semences, de l’engrais et des gouttes à gouttes pour l’irrigation », se souvient-il.

« Si on avait ce modèle de ferme dans les 552 communes que compte le Sénégal, ce serait vraiment une grande avancée pour freiner l’immigration car cela créerait beaucoup d’emplois », analyse François Samb, volontaire au PNUD et détaché à Mont-Rolland. « C’est assurément un modèle à répliquer ».

Un modèle qui montre que l’on peut vivre bien voire mieux qu’en ville, tout en ayant du travail. « Si on aide la jeunesse au Sénégal ainsi qu'au Sahel, elle pourra se développer et développer les pays. La jeunesse veut réussir ! ».